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Je reviens de la vérité

Publié le - Mis à jour le 19 novembre 2021

La pièce Je reviens de la vérité qui sera jouée à Boissy le 26 novembre au Théâtre Le Forum est une adaptation de Qui rapportera ses paroles ? créée en 1947 par Charlotte Delbo. La metteure en scène et actrice Agnès Braunschweig nous parle de son travail sur cette œuvre, qui témoigne et met en lumière […]

La pièce Je reviens de la vérité qui sera jouée à Boissy le 26 novembre au Théâtre Le Forum est une adaptation de Qui rapportera ses paroles ? créée en 1947 par Charlotte Delbo. La metteure en scène et actrice Agnès Braunschweig nous parle de son travail sur cette œuvre, qui témoigne et met en lumière le combat des résistantes.

Avez-vous réadapté cette pièce à l’occasion des Célébrations Nationales 2013 du centenaire de Charlotte Delbo, ou étiez-vous également motivée par un devoir de mémoire ?

Ni l’un ni l’autre. J’ai trouvé cette pièce par hasard à un moment où Charlotte Delbo était extrêmement peu connue. J’ai été saisie par la beauté de cette écriture qui n’est à aucun moment chargée de haine. Elle ne nomme ni les Allemands ni les nazis et vise l’universalité. Bien sûr, on fait œuvre de mémoire en jouant cette pièce, mais l’intention originale était de porter sur scène une œuvre artistique.

Etiez-vous à la recherche d’une pièce retranscrivant le vécu des femmes dans les camps ? Et si oui par quel traitement particulier avez-vous abordé cet aspect ?

Je n’étais absolument pas à la recherche de quoi que ce soit. Mais ce qui m’a fortement intéressée c’était que Charlotte Delbo était l’assistante de Louis Jouvet et assistait à tous ses cours du Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique. Elle a mis des indications scéniques en début de sa pièce que j’ai respectées scrupuleusement : elle tenait à ce qu’il n’y ait aucune représentation naturaliste, que tout se passe avec le traitement de la lumière, le mouvement des comédiens et les voix.

Qu’est-ce qui vous a poussé à choisir une mise en scène aussi épurée ?

Je tenais à quelque chose de très sobre. On est vraiment sur le fil dans une pièce comme celle-là : entre l’émotion et le contrôle. On ne peut pas avoir une froideur totale par rapport à ce qu’on raconte, et on ne peut pas se laisser aller à l’émotion trop grande. C’est vraiment ça le plus délicat : essayer de contenir l’émotion, la donner à entendre et à voir, et la rendre supportable. 

Le cercle blanc a-t-il une valeur symbolique spécifique ?

Le cercle blanc c’est un outil scénographique qui me permet de raconter. Il raconte ce que les gens veulent y voir, la blancheur de la neige, le cercle des enfers, le cercle vicieux dans lequel on entre et dont on ne peut plus sortir, tout en restant suffisamment à la frontière entre l’abstrait et le concret.

Comment votre pièce a-t-elle été reçue auprès du public, y compris le jeune public?

On a reçu des accueils formidables du public, de tous les âges. Que ça touche aussi les lycéens et les collégiens, ça nous importe énormément. Cette pièce est forte, parce qu’elle est précise dans ce qu’elle raconte des douleurs, pleine de valeurs positives, de solidarité, d’entraide, de résistance. Et c’est une écriture de femme qui raconte cette souffrance, mais sans accuser et sans violence, avec la force et la fierté des résistantes. On joue cette pièce depuis 10 ans maintenant, et à chaque fois, on est bouleversé.

Charlotte Delbo (1913-1985), passionnée de théâtre et assistante de Louis Jouvet est entrée dans la Résistance dès 1941, à la suite du décès de son ami André Woog, architecte condamné à la guillotine. Arrêtée et incarcérée à la prison de la Santé en mars 1942, elle sera déportée le 24 janvier 1943 à Auschwitz-Birkenau, dans un convoi de 230 femmes. Elle fera partie des 49 rescapées, libérées en 1945. Décédée à Paris en 1985, elle laisse derrière elle une œuvre de récits, de pièces de théâtre et de poèmes, essentiellement autour de la déportation.